On sortait du concours blanc, encore un, à force on ne les sent même plus passer, lassitude et habitude. Le vrai dans quinze jour, mais on essaie de pas trop y penser. On est restées dehors cinq minutes, avant de se séparer. On attendait un ami, enfin un ami à moi, son ami à elle. Rencontré entre deux cours, et deux tds. Elle a eut un sourire d'excuse, désolée mais je peux pas te ramener en voiture tu sais.. Je sais comme toujours depuis un mois et je m'en fous. Tu as quelqu'un à aimer et tant mieux pour toi.

J'étais un peu fatiguée, je me suis laissée glisser, dos au mur, en l'écoutant parler de chez elle, de sa famille -elle ne se lassera donc jamais ?-. Je l'aime bien, mais au bout d'un an à la côtoyer quotidiennement, à encaisser son stress et ses doutes, je sature un peu. Je l'aime bien, on rit beaucoup ensemble.
J'veux bien essuyer tes larmes, rassurer un doute, je l'ai fait, beaucoup, même si depuis quelque temps, il a prit le relais, et c'est tant mieux, j'veux bien qu'on rie ensemble en lisant une bd d'humour noir de Frankin aux poses, j'veux bien qu'on s'appelle, qu'on passe un bout de vacances ensemble, mais s'il te plaît, arrête de me parler d'eux.

Je crois que c'est la fille cachée de Charles Ingals, genre famille idéale. Son frère est dans la même école que le mien, mais eux c'est pas pareil, ils ont réussit là où on a échoué.
J'ai essayé de te dire, mais tu n'as pas vraiment compris. Ca me fait mal, quelque part, de t'entendre parler ainsi de ton frère. Tu l'idolâtres littéralement. Tu souris quand tu en parles. Vous vous aimez. C'est mignon.. Oui, je suis mesquine, et alors ? Je suis aussi frustrée, alors tu sais...

Tes parents sont des héros, aussi. Ton seul problème avec eux, c'est que, d'après ce que tu m'a dis J'ai l'impression que j'ai pas vraiment résolu mon Oedipe. Effectivement tu es amoureuse de tes parents. Tout ce qu'ils font c'est génial, ce qu'ils ont raté, etc. C'est pas de leur faute. Tu leur trouves toutes les qualités, et pour celles qui n'y sont pas tu leur trouves des excuses.
Un jour tu m'as dit que t'avais entendu par hasard un chroniqueur télé génial, sur une radio que j'écoute souvent, je connaissais aussi, et j'aimais bien. tu étais satisfaite Tu comprends, j'ai adoré, parce qu'il tapait sur tout ce que je méprise, TF1, la real TV, et les spectateurs.
J'étais trop fatiguée pour relever, j'ai laissé tomber. Lâcheté ordinnaire et mérpisable, c'est tellement plus simple d'avoir raison en silence. 
A cet instant tu m'as dégoûtée, un peu, avec ton sac à main en cuir, ton stylo que t'a offert ton grand père pour signer les ordonnances, comme tu le répètes à qui veut l'entendre, ton admiration enfantine pour tes parents, ton adoration pour ton frère, tes certitudes déjà établies, ton échelle de valeurs arrêtée, qui te permettaient de mépriser, en bloc, TF1 et ses spectateurs, mais toi quand tu écoutes cauet le matin, c'est pas pareil, t'es obligée d'écouter cette station pour avoir de la musique, et puis les autres c'est vulgos. Ouais. ton snobisme sélectif et assumé, m'énervait, mais en silence, et c'était sans doute moi la plus lamentable des deux.
J'ai entendu qu'une fois cauet, c'était le matin, je prenais un café à la cafet, en attendant l'ouverture de la BU, et j'ai finit par lancer des morceau de sucre sur les hauts parleurs, sous l'oeil ensommeillé mais hilare de mon voisin.

Quand on me demande de parler de ma famille, je dis que mon père est mutique, que ma mère artificialise les choses, et j'ai toujours pas trouvé les mots pour parler sereinement, et justement de mon frère.

Tu méprises peut être un peu trop facilement, et tu manques un peu d'empathie, sans doute.
Moi, madame D. disait que j'étais empathique et altruiste, mais je voulais pas la croire, ça l'avait surprise d'ailleurs Mais vous savez c'est quelque chose de bien. Ouais ben justement. Et si je méprise pas les gens, ils ne le savent pas, parce que je ne sais pas leur parler. Et puis je suis lâche, impulsive et narcissique. Et puis je suis... 

Là, je donne l'impression de nous opposer frontalement, mais je t'apprécie, en fait. Même si on ne se ressemble pas. Un jour, à la fac, quelqu'un nous a dit qu'on se ressemblait. Hésitation. Heu. Physiquement. Heu. Pas dans le look en tout cas. Ouais, je m'habiile pas comme une loque moi. Elle m'a regardé, en époussetant sa jupe à fleur, qui n'aurait pas dépareillé dans le XVI -mais faut pas lui dire, elle aime à se moquer des versaillaises- et a ajouté en riant ben quoi, dis quelque chose, défends toi. "oh ça ne me gêne absolument pas d'être une loque, selon tes critères".
Ya parfois comme une tension larvée entre nous, j'ai du mal à en saisir la source exacte.

Je t'envie peut être, par certains côtés. Ta vie dans tes certitudes est plus confortable, en fait.

En rentrant, de la gare, par mon raccourcit favori, qui longe les voies, je tapais du pieds dans les cailloux du ballast, ça faisait mal, un peu, j'avais les larmes aux yeux mais c'était pour autre chose.

Là j'en ai un peu marre de toi. C'est un post totalement mesquin, mais c'est peut être parce que dans le fond, tu réussis là où j'échoue.

T'es équilibrée, t'as une famille ouverte, et tu les admires ostensiblement, tu arrives à parler avec eux, tu parviens à nommer tes émotions, tu parviens à aimer, et à être aimée sans (te) détruire.